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Entretien
au coin du Net avec...
Jean-Louis Larochette-Prost
Michel Bonvalet
Jean-Louis Larochette, vous êtes l'auteur du n°2 de la
collection Signe de Piste édité par Delahaye "Le
continent secret " sorti des presses en 2008, voulez-vous succinctement nous parler
de vous, de votre parcours personnel et/ou professionnel ?
Je suis né à Lyon en 1950.
Asthmatique dès la naissance, je n’ai jamais pu devenir scout,
contrairement à mon frère aîné, qui a participé
au mouvement pendant un an ou deux, avant de renoncer pour des raisons politico-religieuses.
De plus, mes parents ne furent pas très favorables au scoutisme,
par la suite, alors que je rêvais d’y entrer, me moquant éperdument
de la double teinte militaire et catho, car je ne désirais qu’aventures
avec de vrais et bons copains, comme dans la chanson d’Henri Garat.
Heureusement, grâce à de très nombreux séjours
familiaux en Suisse romande et dans le Jura français, j’ai de bonne
heure été initié aux longues marches en pleine nature
et par n’importe quel temps, dont je conserve encore l’habitude, ainsi que
des interminables randonnées à bicyclette qui ensoleillent
toujours mon existence de professeur (à la retraite depuis 2005).
Normalien et étudiant en lettres modernes entre 1970 et 1975, j’ai
été instituteur, puis, tour à tour, professeur de français
dans des collèges et lycées privés, enfin au niveau
supérieur plus récemment avec de jeunes étudiants préparant
divers BEP où le français comptait parmi les épreuves
d’examens. Cela dit, ma « carrière » d’écrivain
commence tardivement, en 1997, alors qu’auparavant j’étais plutôt
un conteur, tant au sein de la famille que du cercle des amis, puis dans le
cadre de vacances pour la jeunesse (milieu associatif, puis privé).
En vérité, j’ai commencé à raconter des histoires
à dix, onze ans, pour d’autres enfants. C’étaient d’abord
des contes burlesques dans le style de Mr Bean, Laurel & Hardy
et Charlie Chaplin ; puis des histoires policières, des aventures
en tout genre et des contes fantastiques, certains demandant douze veillées
de deux ou trois heures !
Le Continent secret, du moins une approche
de cette longue aventure, est né au cours de ces mémorables
veillées estivales, il y a une trentaine d’années. Depuis,
je l’ai considérablement modifié et le premier volume est
paru chez Delahaye.
À part l’écriture, je m’intéresse beaucoup à
l’onomastique (étude des noms et prénoms), mais par dessus
tout à la musique (bien plus qu’à la littérature, d’ailleurs
!) En effet, dès l’âge de six ou sept ans, souvent contraint
de garder la chambre (l’asthme...), j’ai disposé d’un énorme
poste de radio en bois avec grand haut-parleur, un appareil extraordinaire
que mon père avait fait monter par un ami technicien. Ce gros engin
captait les ondes courtes et même les bateaux en haute mer ! J’ai
vite appris à tourner très lentement le bouton de bakélite,
au dixième de millimètre près, pour capter une quantité
considérable de stations, voire de radios-amateurs. Sans personne
pour me guider ni me contrarier, j’ai donc très tôt apprécié
toutes sortes de genres musicaux, sans œillères, sans préjugés,
mon ignorance étant paradoxalement utile à la découverte.
Ce qui explique ma passion quasi pathologique pour la musique d’une manière
générale, ainsi que pour les langues, qu’enfant j’associai
précisément à la musique. Fréquemment branché
sur la BBC (ses speakers, ses concerts ! Mind-blowing !), je n’ai, hélas
! pas été très bon élève en anglais par
la suite, malgré mon affection pour cette langue, que gamin il me
semblait comprendre tout à fait. Bon, il faut dire que l’enseignement
des langues, dans les années soixante, en France...
La littérature vient bien après
la musique et dans ce domaine, ma préférence va... aux auteurs
des dix-sept et dix-huitième siècles, à mes yeux les
plus subtils, les plus étonnamment éclairés, si j’oublie
Rousseau, que j’abhorre, quoique je reconnaisse la qualité
de son écriture. Ensuite quelques écrivains de terroir et des
humoristes comme Pierre Daninos, enfin des auteurs anglais et américains
comme Henry James, Sherwood Anderson, Mark Twain, Charles Dickens,
Booth Tarkington et William Golding. De la littérature actuelle
je suis l’ignorant le plus fervent, ce qui m’a contraint à de sacrés
tour de passe-passe pour préparer mes derniers cours, avant la retraite,
afin de ne pas influencer les élèves, pour la plupart déjà
peu attirés par les Belles Lettres... Connaissant un peu mes goûts,
l’un d’eux m’a d’ailleurs demandé si je n’avais pas été
anglais ou américain dans une vie antérieure. Dans ce cas,
je réponds par une boutade, précisant quand même que
j’ai commencé à vénérer Gershwin
à quinze ans, avec la très sérieuse impression de l’avoir
connu... Bref, le genre de remarque qui fait sourire, voire ricaner méchamment,
aussi m’arrêterai-je ici sur ce sujet. Je reviens à la littérature
pour préciser qu’en fac, je m’étais orienté vers la
grammaire et la stylistique, peu attiré que j’étais par les
autres parties des études littéraires.
Maintenant, je me définis à
nouveau comme conteur,
le terme « écrivain » ne m’attirant pas particulièrement
; ou bien « auteur », plus juste à mes yeux. Peu importe,
j’aime toujours créer des histoires et parfois, il me semble que
mes personnages sont réellement vivants. Qui n’a jamais écrit
ne peut pas saisir. Qu’il me croie, cependant.
- Comment
vous est venue l’envie d’écrire des romans ?
Après avoir longtemps raconté des histoires, à la
veillée, en famille ou chez des amis, ou encore dans de la cadre
de séjours de vacances pour jeunes, dans le secteur associatif ou
en privé. Des anciens auditeurs m’ont vivement conseillé de
coucher certaines histoires sur le papier et je me suis décidé…
peu avant l’an 2000.
-Pourquoi avez-vous choisi la Science Fiction ? Ce thème vous
permet-il de mieux faire passer les messages que vous souhaitez transmettre
à la jeunesse ou est-ce simple préférence littéraire
?
« Le Continent secret » ne relève
pas uniquement de la science-fiction, on peut aussi le classer dans le genre
« fantasy ». Je ne suis pas un amateur de science-fiction, en
vérité, quoique je ne la dédaigne pas. Si l’on veut
faire passer des messages, à la jeunesse ou aux adultes, je pense
qu’on peut le faire par le biais de n’importe quel genre littéraire,
depuis la poésie jusqu’au roman policier !
- Pourquoi écrire pour la jeunesse ?
Écrire pour la jeunesse est pour moi l’occasion de redonner vie
à des contes, des légendes, des épopées créées
il y a vingt, trente ou quarante ans. Du même coup, j’essaie de distraire
les jeunes tout en leur donnant l’occasion de réfléchir à
des sujets sérieux, dont le « Continent secret »
ne manque pas : une société sans monnaie, à l’abri de
toute pollution, presque sans hiérarchie. Et des sujets plus délicats
: le pouvoir, la loi, les croyances (les Juvéniens du Continent ne
sont pas loin du bouddhisme tibétain, par exemple).
-Regrettez-vous de n'avoir pu être scout dans votre jeunesse
?
Ma santé ne me permettait pas de faire partie du mouvement. Asthmatique,
je ne pouvais pas, en outre, subir le moindre vaccin, et je passe sur d’autres
contraintes. En revanche, j’ai souvent envié mon frère et
ses copains, des scouts dans les années 60, avec leur tenue kaki.
- Comment avez-vous connu la collection Signe de Piste ?
Par des copains scouts et un instituteur qui vantait les mérites
de la collection.
-Avez-vous lu des romans de la collection ? Lesquels vous ont le plus
marqué ?
J’en ai lu une trentaine, peut-être. Ceux que je préfère
? « Les Loups de la Rivière Rouge », de
Mike Bruant ; « Port-Sterval »,
de Pierre Delsuc ; « La Bande des Ayacks »,
de J-L Foncine.
- Quel auteur a votre préférence ? Pourquoi ?
Dans la collection Signe de Piste, je pense que c’est Foncine
le meilleur auteur, car son écriture est fluide, subtile sans être
ennuyeuse ni prétentieuse. De plus, ses histoires sont habilement
conduites, en plus d’être captivantes, émouvantes, et surtout
vraisemblables. Enfin, Foncine ne craint pas de bousculer un peu les
préjugés, les habitudes, avec humour et une franchise sans affectation.
Foncine est un véritable écrivain.
-Avez-vous déjà écrit des romans « pour
adulte », vos mémoires, de la fiction, autre ?
J’ai écrit surtout des romans pour les adultes, j’en compte une
dizaine, dont un roman policier. Les autres sont plutôt inclassables
et je me garderais bien de les caser dans quelconque catégorie !
-Comment imaginez-vous le thème et l’intrigue de vos romans
?
Le plus souvent, à partir de thèmes… musicaux ; la musique
étant de très loin l’objet de toutes mes passions, bien avant
la littérature, dont je me détache de plus en plus, aussi
paradoxal que cela puisse paraître. Mais j’écris encore un
peu et Victor Hugo n’a-t-il pas dit « les vaches ne boivent
pas de lait » ?
-Vos livres sont très détaillés et très
techniques, mettez-vous longtemps à les écrire ? Faites vous
des repérages des lieux décrits ou similaires? De la documentation
?
J’écris très vite. Un roman de 500 pages me prend deux
ou trois mois seulement. MAIS… les corrections demandent parfois deux ans
! Je parle de syntaxe, d’agencement des dialogues, d’enchaînements,
de transitions.
Repérage des Lieux ? Pour le « Continent »,
c’eut été difficile de descendre dans les entrailles de notre
planète ! Cela dit, pour un roman dont une partie de l’action se passe
à Stuttgart, j’ai séjourné deux fois dans la capitale
du Bade-Wurtemberg. Sinon, la plupart de mes histoires se passent à
Lyon et dans sa région, ce qui me facilite la tâche, bien évidemment.
-Avez-vous une préférence particulière pour l’un
de vos héros ? Pourquoi ?
J’aime beaucoup Tim Perrinn, le héros du «
Continent secret ». Il est à mes yeux l’image du garçon
dévoué, sincère, aimable et dépourvu de tout
désir de gloire, de puissance et de domination. Je l’apprécie
aussi parce qu’il n’est pas infaillible, ni benoîtement parfait comme
le sont de trop nombreux héros de romans pour la jeunesse. Il se trompe,
il hésite… il est humain. Qui plus est, attachant, fidèle en
amitié, généreux. Le fils que je n’ai jamais pu connaître
et que j’ai donc idéalisé dans un roman. Trop douloureux à
raconter.
-Est-ce que Tim Perrinn connaitra d'autres aventures ?
Les aventures complètes de Tim Perrinn couvrent près
de mille cinq cents pages au format poche… La suite dépend de la maison
d’édition…
-D’autres projets en cours ? Pour Signe de Piste ? Du même
genre ?
D’autres projet, oui, avec des romans et des essais réservés
aux adultes et aux grands adolescents.
Un projet pour Signe de Piste est entre les mains d’Alain Gout…
Et j’attends le verdict ! Aussi n’en dirai-je pas plus. Déontologie
oblige.
-Dans le but de mieux vous connaître acceptez-vous de répondre
à ce questionnaire de Proust ?
• Ma vertu préférée
: la prévenance.
•
Le principal trait de mon caractère: L’indépendance.
•
La qualité que je préfère chez les hommes:
l’humilité.
•
La qualité que je préfère chez les femmes
: L’humour.
•
Mon principal défaut : une farouche indépendance.
•
Ma principale qualité: Je ne sais
pas et je m’en moque bien.
•
Ce que j'apprécie le plus chez mes amis : Mais, ce
que j’ai dit quelques lignes plus haut, voyons !
•
Mon occupation préférée : Me balader
à vélo dans la cambrousse.
•
Mon rêve de bonheur : être facteur d’orgues près
des montagnes écossaises, avec épouse, cinq ou six enfants
et quantité d’amis mélomanes.
•
Quel serait mon plus grand malheur ? Perdre mes sens.
•
A part moi -même qui voudrais-je être
? Je ne sais pas, heureusement ! Quel malheur ce serait
!
•
Où aimerais-je vivre ? En Écosse. Je ne sais
pas trop. Le mieux, en France.
•
La couleur que je préfère : Tout dépend
pour quoi ! En général, le bleu et le vert.
•
La fleur que j'aime Euh !... le muguet.
•
L'oiseau que je préfère : Le martinet, peut-être.
•
Mes auteurs favoris en prose : Voltaire et Twain.
•
Mes poètes préférés: Aucun.
Presque tous chiants au bout de vingt vers. Allez, Hugo…
•
Mes héros dans la fiction : Huck Finn, Penrod, Maigret.
•
Mes héroïnes favorites dans la fiction:
Jane Eyre. (Je ris, parce que je réponds un peu vite n’importe quoi
!)
•
Mes compositeurs préférés : Ravel, Gershwin,
Schumann, Widor, Duke Ellington.
•
Mes peintres préférés : Je ne vois pas.
•
Mes héros dans la vie réelle : Ettore Bugatti,
George Gershwin, Thomas Edison.
•
Mes héroïnes préférées dans la
vie réelle: Michèle Morgan, Martha Argerich.
•
Mes héros dans l'histoire : Je ne vois pas.
•
Ma nourriture et boisson préférée:
La morue sous toutes les formes de préparation ; le cidre, le morgon…
•
Ce que je déteste par-dessus tout: Le luxe, le
bruit et la volonté de pouvoir.
•
Le personnage historique que je n'aime pas : J-J Rousseau.
•
Les faits historiques que je méprise le plus : Les
guerres et les révolutions.
•
Le fait militaire que j'estime le plus : Le Débarquement.
•
La réforme que j'estime le plus : Je ne vois pas.
•
Le don de la nature que je voudrais avoir : Voler.
•
Comment j'aimerais mourir : En dormant.
•
L'état présent de mon esprit : Que c’est douloureux,
de répondre, de s’étaler… !
•
La faute qui m'inspire le plus d'indulgence: l’étourderie.
•
Ma devise : Ailleurs, autrement, mieux.
Bibliographie
:
Le Continent secret, publié par Delahaye.
(vente directe par Carnet de Bord)
Adieu, Monsieur Delay-Garon, aux Livres du
Milieu. Roman policier.
www.livres-du-milieu.com
Gershwin retrouvé, aux Livres du Milieu.
Petit essai pour les mélomanes qui connaissent peu ou pas du tout
le compositeur.
Les Traboulans, autoédition ; roman
lyonnais. Une bande de gones des années 60. (Il m’en reste quelques
dizaines d’exemplaires. Non diffusé.)
Un Poète en Baskets. Roman (adultes
et ados + 15 ans).
Carole Sistersia, roman de la Mère,
tome 1 (sur 4). Roman.
Emma’s house. Roman (en français...)
Petit guide grammatical (scolaires et adultes
apprenant le français).
Voir le détail des ouvrages sur le site www.thebookedition.com
Ce harcelement de questions vous a
été pénible, cher Jean-Louis, qui n'aimez pas parler
de vous, nous vous en remercions d'autant de l'avoir subi avec humour
et sympathie...Je note au passage que nous avons un gout commun pour le
Morgon (il y en d'autres mais moins apparents).
Nous
espèrons lire bientôt la suite des aventures de Tim.
Merci
encore.
Mic
©Michel
Bonvalet 2010 |
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